Papoter, parler, écrire, dialoguer
En guise de réponse aux commentaires si riches que j'ai reçus sur ma note de hier, et en guise de commentaire aussi à la note que Alainx a écrite hier à ce sujet, voici quelques réflexions supplémentaires...
Dans une conversation habituelle, il est rare qu'on dise de soi des choses vraiment importantes, qui conduisent à un échange en profondeur. On est arrêté par la timidité, la peur du jugement, le manque d'écoute véritable de l'autre, les distractions ambiantes et sans doute bien d'autres facteurs. Il n'est pas souhaitable d'ailleurs de raconter de soi à n'importe qui, n'importe quand. Il m'est arrivé de recevoir une confidence inattendue et "forte" sur le pas d'une porte, et de ne pas trop savoir qu'en faire, moi comme l'autre nous trouvant soudain gênés de cette confidence un peu encombrante. D'ailleurs ai-je reçu cette confidence parce qu'on a eu confiance en moi, ou simplement parce qu'une impulsion imprévisible a fait sortir des mots soudain trop difficiles à garder?
Lors d'un dialogue plus en profondeur avec un(e)amie, les choses sont différentes: on n'est que deux, on a choisi de se rencontrer, c'est la plupart du temps pour échanger en vérité, en profondeur, en intimité
Je rencontre ainsi régulièrement mes rares vrai(e)s ami(e)s, on va le plus souvent déjeuner ensemble trois ou quatre fois par an. On parle de tout, de rien, mais le tout et le rien s'inscrivent dans la profondeur de qui on est et qu'on est prêts à partager à l'autre. On le souhaite d'ailleurs, c'est pour ça qu'on se rencontre...
A deux, autour d'une table, il n'y a plus de timidité, de peur, de rapport de forces, d'ascendant d'une personne sur une autre, on peut parler, écouter l'autre, et de ce dialogue, naît la proximité d'une amitié vraie: et c'est bon.
Mais il est vrai que parfois, même dans des échanges de ce type, on est soudain arrêté par un regard de l'autre, une mimique, un questionnement imprévu et qui soudain nous bloque. Il m'est arrivé de terminer autrement la phrase que j'avais commencée, simplement parce que l'attitude corporelle de l'autre me montrait que je risquais de ne pas être comprise. Dans ce cas, je préfère renoncer que m'obstiner. Sans doute que moi aussi j'ai dû par une mimique, une moue, ou une question quelconque, décourager mon ami(e) de continuer sur sa lancée...
Alors il y a la lettre, le mail adressé à l'autre et qui indéniablement quand on a décidé d'entrer dans un dialogue constructif, permet de l'approfondir davantage. Là, on est assuré de ne pas être interrompu, de ne pas dévier du sujet, de pouvoir aller jusqu'au bout de sa pensée. En écrivant, on va plus loin aussi, l'écriture creuse le sujet au fur et à mesure; conduit parfois dans des chemins qu'on n'avait pas soupçonnés et qu'on découvre en écrivant.
Bien souvent j'ai pu écrire à quelqu'un des mots que je n'arrivais pas à lui dire. Sur un ton mesuré que je ne suis pas toujours capable de garder quand la personne est devant moi. Il est vrai que en écrivant je peux corriger une phrase maladroite ou qui risque d'être mal comprise. Je peux ajuster mes mots au plus près de ma pensée. Les mots sont mes amis aussi dans le dialogue par lettres ou mails. Je leur fais confiance. j'ai appris à ne plus jamais écrire sous le coup de la colère, mais d'attendre un jour pour que mes mots ne risquent pas de blesser, ni l'autre, ni la relation, ni moi en définitive..