Se méfier des sentiments qui brûlent...
Quelques mots de Charles Juliet dans son Journal intitulé "Au pays du long nuage blanc", quelques mots qui me parlent ce matin...
"Depuis bien des années, l'écriture m'a permis de me déverrouiller. Le jour où j'ai compris qu'écrire, c'est se livrer, donner ce qu'on est, ce qu'on porte en soi, j'ai voulu dire ce que j'avais à dire sans me laisser brider par des peurs, des censures, telle ou telle considération. Ce que je dévoile de mon activité intérieure, mon lecteur peut le retrouver en lui. Je me repose donc sur cette idée que nous avons tous deux beaucoup en commun, et que je n'ai pas à redouter ce qu'il pensera de moi"
Je pense en effet que ce que j'écris, que ce soit ici ou dans mes écrits papier, rejoint le vécu de pas mal de gens. Ils me le disent, ils me l'écrivent. Parfois au contraire, ce qu'ils vivent est très différent, mais mes mots les interpellent, les font réfléchir (ou rire...) Or, mon but premier en écrivant, c'est de mettre par écrit ce qui moi, m'a frappée dans le banalement quotidien de ma vie, ce que j'en tire comme enseignement de vie.
Les blogueurs en général sont ouverts à cette démarche de l'écriture qui "raconte le soi". Même dans les petits riens de la vie quotidienne. Ils expérimentent qu'ainsi ils touchent les autres, à divers points de vue et qu'ils peuvent avoir un impact (positif de préférence) qu'ils ne soupçonnent pas en écrivant tel ou tel billet.
Mais bien des non-blogueurs, ou ceux qui ne sont pas familiarisés avec cette démarche du "dire de soi", sont facilement scandalisés par ce qu'ils considèrent comme du déballage en public, comme une mise à nu totalement impudique. Ils ont des mots très durs concernant les blogs de type journal.
Pour eux on lave son linge sale en famille, et même son linge tout court. Ce qui se passe dans son intériorité ne regarde personne, il ne faut pas en parler, c'est indécent. Il faut veiller à ne jamais perdre la face. Semer au grand vent du net des anecdotes personnelles ne se fait pas. Et on ne parle surtout pas, à personne, des déchirures que la vie nous occasionne. Et on n'écoute surtout pas l'autre quand il fait part de ses propres déchirures, qu'on balaie d'un rapide c'est pas grave ou mais tu fais tout un monde de pas grand chose ou dors ça ira mieux demain...
A croire que les sentiments qui "touchent", sont des sentiments qui "brûlent". Il faut donc s'en préserver en les ignorant... en faisant comme si...
Et c'est comme ça qu'on en arrive à vivre côte à côte, comme des étrangers, qu'on croit connaitre, le plus souvent en les étiquetant...
C'est d'ailleurs curieux que certains blogueurs en arrivent à être plus "proches" de leurs amis virtuels que de membres de leur famille... Mais il est clair qu'on se "regroupe" par affinités, par intérêts de pensée...
Bref, quelques réflexions au départ de ces lignes de Charles Juliet lues ce matin