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Coumarine, Petites paroles inutiles
26 février 2010

Il suffirait de peu

Je le vois
L'homme là en face, juste à hauteur de ma fenêtre.
Il est assis à califourchon sur le toit, il fait une réparation, enfin je ne sais pas trop...
Je le regarde, fascinée: il avance, assis sur le toit, les jambes d'un côté, puis d'un seul coup, lancement des jambes de l'autre côté et hop! Il avance au gré des saccades et des petits sauts qu'il fait faire à son corps.

J'assiste fascinée à sa danse improvisée de funambule. Que nul ne regarde, il se croit seul, d'ailleurs il l'est. Il ne sait pas que j'ai les yeux rivés sur lui, et en moi l'admiration et l'appréhension se mélangent...

Il suffirait de peu.
Un faux mouvement. Un vent violent qui se lève, une grosse pluie, ça arrive, et parfois sans prévenir
Il suffirait d'un faux mouvement, qu'il rate le coup des jambes d'un côté, puis de l'autre.
J'imagine la chose: il glisserait jusqu'à la gouttière, puis... puis... par terre, là tout en bas... puis... plus rien, le silence. Et il y aurait pour lui un avant. Et un après.
Comme dans les pub de lessive: avant, après, voyez la différence messieurs dames (surtout mesdames!), c'est-y pas beau ça?

Il est un peu fou ce type, je ne vois aucune corde qui l'arrime, sans doute est-il confiant en sa bonne étoile
Ou alors confiant en son inconscience.
Il suffirait de vraiment peu. Ne le sait-il pas?

Je frémis... et mon coeur bat au rythme de ses sauts de danseur sur les toits dont il répare les ardoises...

A circuler librement de cette façon, comme personne ne le fait, à se trouver à hauteur des plus hautes branches des arbres, à regarder le ciel sans rien qui entrave le regard, à circuler sur les cimes, même si ce ne sont que celles d'un toit... quel genre de pensées peut-on avoir?

Je crois, des pensées d'oiseau libre...

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Commentaires
C
merci Candide pour ton beau commentaire...et merci d'être revenu!;-)
C
Bonjour Coumarine !<br /> <br /> Pour de multiples raisons, je n'ai pu accéder ici, ou trouver le temps de réagir à tes textes. Mais de loin en loin, je revenais en visite, furtivement. <br /> Et cette fois, tu m'interpelles : j'ai été couvreur, et j'aime être en hauteur. J'ai aussi fait de l'escalade. Il est vrai qu'il existe chez de nombreux couvreurs et charpentiers une réelle fierté à être "de ceux qui marchent là-haut".<br /> Mais ne t'inquiète pas pour lui, s'il le fait, c'est qu'il s'en sait capable.<br /> L'expérience et l'entraînement venus de la quotidienneté du travail font qu'on fonctionne un peu différemment de toi quand tu déambules tranquillement dans ton salon ou ton jardin. Dans ce cas, notre seule implication consciente dans le déplacement se résume à décider d'aller d'un point à un autre, et on laisse le corps exécuter de façon routinière des mouvements connus de lui, dans un environnement sans risques. Evoluer sur les toits sans protection nécessite une attention particulière et constante à ce que l'on fait. Mais attention, il ne s'agit pas de penser en permanence "bon dieu, faut que j'fasse gaffe, sinon j'me tue !". Le danger résidant essentiellement dans un déséquilibre inattendu. Il s'agit, simplement et sereinement d'être présent à chacun de ses gestes, d'en estimer les conséquences, et de rester en permanence dans le cadre de nos capacités physiques (force, souplesse, équilibre...). Je le répète, il n'y a pas de prise de tête. Il s'agit seulement d'une attention diffuse et distanciée, où l'on écoute aussi en permanence toutes les informations et sensations que nous envoie notre corps. Et puis il y a peut-être aussi ce qui ne se vois pas. Pour ma part, mes mouvements étaient orientés dans le sens d'un infime déséquilibre choisi, destiné à orienter une éventuelle perte d'équilibre en direction de la sécurité, ou en préparation d'une manoeuvre de récupération. C'est ainsi que je suppose que ton couvreur jouait du poids de son corps quand il lançait les jambes par-dessus le faîtage, et que l'esprit était prêt à lancer un bras (léger tonus musculaire) en cas de besoin. Il s'agit simplement d'une routine différente de celle du citoyen lamba marchant sur le trottoir. Peut-être ne s'agit-il tout simplement que de conscience et de concentration ? Et cette capacité permet de faire des choses "impensables" : il m'est arrivé, sur des toits de tuile, de marcher sur le faîtage. Non par défi, je ne rentre pas dans ces jeux. Mais parce que ça s'inscrivait logiquement dans mon déplacement sur le toit.<br /> <br /> Alors, je ne sais pas ce que peut penser un oiseau libre... mais il existe une vrai satisfaction, un réel bonheur à être là-haut, plus près du ciel...<br /> <br /> Au-delà, il m'est arrivé de grimper seul. A un niveau très ordinaire, dans des voies ordinaires. Seul dans la voie, mais aussi seul sur le site, déserté en semaine. Seul mais auto-assuré, je suis pas fou quand même.<br /> C'est d'une grande densité. Ces moments sont les seuls où je me suis senti totalement, intégralement responsable de moi-même, de ma vie. C'est extrêmement gratifiant, et ça vaut toutes les thérapies et tous les Prozacs du monde... <br /> <br /> Et crois-moi, je ne suis pas un casse-cou. Ne le répète pas, mais il se pourrait même que je sois un peu douillet . . . :o)))<br /> <br /> <br /> Candide
P
Il y a beaucoup de domaines dans lesquels les professionnels ressentent les mesures de sécurité comme une contrainte... jusqu'au jour où. C'est idiot, sur tes derniers mots, pensées d'oiseau libre, je ne peux m'empêcher de penser à la fin de la chanson de Bénabar "Le trentenaire"...(ce n'est pas poétique du tout!!!)
D
pour répondre à Walrus, en Belgique tout chantier exige un coordinateur sécurité chantier qui gère et coordonne la sécurité des différents corps de métier. Il est impératif, après analyse, de proposer des solutions collectives voire individuelles pour assurer la sécurité des ouvriers. Mais il est connu que les couvreurs refusent le harnais... Si l'employeur n'a pas fait le nécessaire et n'a pas assez communiqué à ce sujet, il endosse la responsabilité. <br /> Personnellement, je n'ai le vertige que lorsque je perçois un danger potentiel pour un de mes enfants... c'est un sentiment très difficile à réfréner.
P
Je pense que c'est comme beaucoup de choses : si tu es occupé(e) tu ne sens pas ni le vide , ni la difficulté : monter sur un toit pour changer une tuile, pas de pb, grimper dans un arbre pour couper une branche, OK, monter sur un rebord de fenêtre pour faire les vitres, facile. Par contre, se placer au bord d'un vide et "regarder" le bas : tu tombes.
Coumarine, Petites paroles inutiles
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