C'est dans l'odeur d'un livre que se lit son histoire
J'ai pris au hasard un vieux livre, hérité de je ne sais plus qui, ou cueilli je ne sais plus dans quelle brocante.
Il respire le vieux papier, cette odeur un peu moisie qui attire et écœure à la fois. Il contient toutes les poussières déposées par la vie, ainsi que les secrètes espérances ou les vieux chagrins d'anciens lecteurs, qui se sont autrefois accrochés aux mots, recroquevillés dans un fauteuil à bascule, ou réfugiés dans le chaud d'une couverture de laine.
Il y a des livres comme ça qui racontent deux histoires...
D'abord l'histoire qui se lit dans le livre, tout au long des mots qui courent sur le papier usé.
Et puis l'histoire de ses lecteurs, qui se devine au travers des taches diverses et indéfinies, (café, chocolat...) et au travers de ses petites ou grandes déchirures (pages cornées, couvertures abimées...)
Il y a des livres qui ont beaucoup souffert. Qui se sont déchirés, cassés de partout, des livres à écorchures multiples, à arthrose inguérissable.
Il y en a même qui gardent pour toujours la trace de quelques larmes, déposées là dans l'émotion d'un moment. Ou la trace de deux ou trois sourires qui ont ensoleillé l'âme de tous ceux qui, au fil des mots dévorés, ont rêvé d'autres mondes, d'autres univers, ont plongé pendant des heures dans des histoires insolites...
J'aime les livres neufs: ils sentent la promesse d'une lecture palpitante ou réfléchie, et dont je serai la première lectrice. J'aime infiniment l'odeur du papier vierge, que je respire à chaque page tournée (ou presque)
Mais j'aime aussi les livres qui sont passés dans mille et une mains et qui m'apprennent au détour de leurs pages que tel passage souligné a marqué un homme ou une femme qui sans doute me ressemble.
Parce que les passages soulignés me parlent, à moi aussi...