20 novembre 2007
A jamais...plus UN jour
Dans les contes de fées, les choses ne sont jamais faciles
Les princesses sont prisonnières d'un maléfice, les enfants sont abandonnés dans la forêt hostile, les princes doivent partir au bout du monde pour briser les sortilèges
Les héros doivent souvent partir au bout du monde et ...au delà
Ceux qui échouent dans leur quête ne sont pas parvenus à franchir cette barrière symbolique
Quand on est arrivé au bout du monde, qu'y a-t-il "au-delà" et qui semble la plupart du temps si inaccessible, si dangereux d'accès?
Je me dis que cet "au-delà" se trouve "à l'intérieur" et ce n'est que quand le héros (c'est-à-dire nous) accepte d'aller jusque là qu'il peut poursuivre sa recherche
Chercher à l'intérieur ce qu'on croit trop souvent trouver à l'extérieur...on pourrait en dire des choses là dessus!
Parce que me frappe aussi la durée imposée par la quête: "à jamais, plus un jour"
Je crois que comme pour "l'au delà" dont parle le conte, c'est ce fameux jour en plus qui contient le secret
J'imagine que "à jamais" c'est de l'ordre du temps pour toujours. Mais le jour en plus, c'est le Temps qui se retourne, qui fait conversion (selon le sens étymologique).
Le jour en plus c'est l'instant, le maintenant qui va et vient au rythme de la respiration.
Ce n'est pas UNE fois qu'il faut vaincre le dragon ou les dangers qui parsèment la route du héros, mais à chaque instant, minute après minute
Les contes de fées, les contes et légendes de tous pays, m'ont toujours beaucoup parlé
Ils sont une extraordinaire densité de sagesse humaine
J'ai toujours été frappée par le nombre de héros qui sont endormis (aussi dans l'Evangile les amis de Jésus qui s'endorment au moment crucial, dans le jardin des oliviers)
Il ne s'agit pas du sommeil réparateur des forces, prévu par la nature
mais du sommeil qui endort cette partie de nous qui devrait sans cesse rester en éveil...
Cultiver la vigilance, rester en éveil à tous les niveaux ...on pourrait tout autant en dire plein sur ce sujet!
parfois l'amour vrai est capable d'éveiller en nous ce qui sommeillait encore
Bien sûr il va sans dire je ne crois pas une minute que les contes de fées et autres légendes ne s'adressent qu'aux enfants...
Commentaires
Pour aller dans ton sens, autant dire pour ne pas perdre le fil de couette...
L'un des mini-contes de Tim Burton , La triste fin du petit Enfant Huître et autres histoires, 10/18, p.69-70. Pour illustrer la notion controversée du sommeil réparateur...
Bises Coum.
Et clins d'yeux
(ceux du dehors et ceux du dedans).
***
LA FILLE QUI SE TRANSFORMA EN LIT
C'est arrivé le jour où
la fille avait cueilli de bizarres chatons de saule.
Sa tête gonfla et blanchit, tout
en devenant,tel un oreiller, molle.
Sa peau qu'enlaidit d'abord une texture
floconneuse de vilaine allure
devint ensuite une couverture
de coton 100 % pur.
A travers ses organes et son torse,
elle poussa comme des sortes
d'ailes, et une belle literie en résulta,
ressort et matelas.
Etrange et terrible chose !
Je commençai par verser des larmes,
mais j'eus pour dormir, après la métamorphose,
un lieu plein de charmes.
***Je pense aussi que les contes ne sont pas que pour les enfants. Et concernant l'écriture, je trouve même qu'il s'agit là du stle qui m'attire le plus, le plus ardu, le plus noble (mais vraiment à mon humble avis)
J'aime les contes (et je vais en relire avec l'axe du temps et de l'endormissement .. très intéressant !)J'aime ce que tu dis sur "l'au-delà" qui est un « en dedans ».
Les contes ne s'adressent pas qu'aux enfants. Je comprends bien ce que tu veux dire. Mais j'ai envie de formuler la même chose un peu autrement : les contes s'adressent toujours aux enfants... Peut-être justement à l'enfant qu'on laisse dormir en nous bien (trop) sagement ! Et qu'il serait temps de réveiller pour qu'il puisse faire ses espiègleries et mettre en oeuvre ses audaces dans les adultes que nous sommes...
En te lisant me venait aussi quelque chose qui est peut-être d'un autre domaine. À propos de ce que tu dis des épreuves à traverser, de tout ce qu'il faut vaincre pour aboutir.
Je me demande si les jeunes d'aujourd'hui ne manque pas de rites initiatiques, de ceux qui marquaient les étapes du développement.
Aujourd'hui, il existe certains rites, mais tous me semblent de l'ordre du compétitif. (À l'école, dans le sport, l'exercice d'un art, etc.) ce sont des rites par affrontement aux autres, pas par affrontement avec soi-même.
Enfin, je ne sais pas...
Cela me pose question en tout cas toute cette éducation cocooning qui semble être l'apanage d'une éducation réussie.
La surprotection de l'enfant lui rend un mauvais service pour son devenir.Le conte est ( pour moi ) à la fois initiatique et analytique.
Enfant il nous permet d'affronter ce que l'on appelle nos " mauvais instincts ", de les éveiller et ensuite de les épuiser.
Adultes, comme tu le dis, il devient quête intérieure.
En fait, le conte est le miroir de la nature humaine. Un miroir que l'on doit briser pour vivre pleinement conscient.
Mais on pourrait en discuter des heures parce qu'il va bien au delà !Bernard...y aurait-il une princesse qui vient te réveiller d'un baiser?
)
MthP...eh bien je ne connais pas Tim Burton. Encore quelqu'un à découvrir
Le sommeil réparateur l'est pour autant qu'il ne grignote pas la vie...
Vertumne...l'était bonne cette petite sieste?
Papa de Lili,c'est un vrai secret ça...pouvoir garder son regard d'enfant...Miss Line.. merci de mettre le doigt sur le "message" que j'ai voulu faire passer...
bises à toi
Alain intéressant ce que tu dis sur les rites de passage
Je suis persuadée que les rites, importants pour marquer les passages d'une manière ou d'une autre n'existent plus vraiment, sinon comme tu le fais remarquer dans la compétitivité
Oui il y a le danger du cocooning exagéré qui empêche le jeune de se mesurer à la vie, à sa dureté
Souvent je suis en opposition avec mon mari qui veut rendre la vie facile à nos enfants en les aidant même quand ils ne le demandent pas
Je ne suis pas sûre que ce soit le bon chemin
Aedia...oui, le sujet est vaste et on pourrait en discuter longtemps
J'aime les contes, ils me parlent
Mais je ne me restreins pas aux contes de grimm et perrault de notre enfance
Il y a tous les autres, de toutes les cultures du mondeJ’ai découvert ton blog hier au soir, par hasard. Aujourd’hui, j’y suis revenu, je remonte lentement ton temps, je m’étais dit que je posterais un petit mot d’encouragement-remerciement (mais en as-tu encore besoin vu la foule de tes lecteurs-admirateurs ?) quand je serais parvenu à octobre 2004 mais c’est tellement riche, il y a tellement à décanter que je préfère prendre mon temps pour lire, et donc je t’écris dès ce soir. Un immense merci pour cette pelote d’énergie humaine bien réelle au cœur du virtuel. Je n’en crois pas encore mes yeux ni mes oreilles : quoi ! je vais pouvoir lire Coumarine plusieurs fois par semaine et dialoguer avec elle (bon, ça, si elle veut bien…).
Ce verbe haut porté (parce qu’on sait qu’au fond, il nous portera aussi), cette exigence de qualité, de sincérité, de droiture, tout ça a eu sur moi un effet tonifiant assez extraordinaire et m’a empli d’une joie très profonde et pour longtemps.
Au plaisir donc de te lire, en espérant de temps à autre, au détour d’un commentaire, pouvoir te donner un peu de moi pour correspondre.Bonsoir Franck et bienvenue
Je te remercie particulièrement pour tes mots qui ce soir me touchent au coeur de qui je suis, de qui je me sens être
Et si en me lisant on est comme tu le dis, empli d'une joie profonde...alors je suis tout simplement heureuse
parce que ma vie a un sens qui va dans le sens de l'humain
Caro...raconter des histoires à ses enfants...tant de choses passent dans l'oralité!Je suis entièrement ...
... d'accord avec toi. Au vu de tout ce que peut contenir un conte de fée, il est bien évident que c'est bien à l'adulte qu'ils sont adressés par ces écrivains de type Andersen... L'enfant n'en garde lui qu'une partie: la plus belle évidemment!!! Mais c'est normal aussi!!! J'ai aimé et j'aime toujours les contes de fée, et même si finalement la vie n'est pas tous les jours facile, il ne tient qu'à nous d'en faire un, conte de fée, et les petites bonheurs de chaque jour qui passe, valent à eux seuls bien plus que toutes ces gros trucs m*rdiques que l'on peut accumuler dans notre vie, lol!!!
N'est-ce pas ça "la positive attitude", pour reprendre une chanson de L*rie, que ma fille a beaucoup aimé avant ses onze ans.Connais-tu les livres de Jean-Pascal Debailleul, un psy qui a mis au point une méthode pour se réaliser à partir des contes ? Il explique qu'en chacun de nous se trouve un héros qui doit traverser certaines épreuves pour arriver au but qu'il s'est choisi et il donne des clés d'interprétation et d'utilisation des contes. Ses lectures sont intéressantes. Sa méthode... lui rapporte beaucoup, je pense...
nous sommes les héros de notre propre conte, notre vie avec ses petits et ses gros dragons, avec ses grands méchants loups, avec nos chutes dans des gouffres sans fins, et nos endormissements et nos réveils. à jamais plus un jour, c'est à jamais qui est en trop, le conte-vie est à vivre au jour le jour.
tout à fait d'accord avec l'"au-delà qui est au dedans", cet au-dedans qui, si on est en harmonie avec, nous permet de sortir à l'extérieur de nous-mêmes pour rencontrer l'"au-delà" des autresMagel...les contes sont parfois même bien effrayants pour les enfants
Daniala...non je ne connais pas ce psy...que de choses à découvrir encore..c'est ça qui fait que la vie est passionnante
chrysalide...j'aime BEAUCOUP ta dernière phrase avec laquelle je me sens en total accord
gballand...ah!!! Fernando Pessoa...la liberté EN soi! c'est vrai ça, ailleurs elle n'est pas......une densité de sagesse... pour moi ce ne fut pas le cas: je n'y voyais que des naifs, des personnes trop enfantines, des trahisons, des dons d'amour juste par les mots et non les faits. Je n'ai pas du avoir les bons contes...ou je n'ai pas du avoir d'enfance...ou je n'ai pas su cheminer...je vais me pencher sur la question (en billet bien sûr!). Merci de tous tes mots, tes cheminements me sont précieux.
Une fois n'est pas coutume, je viens te faire un peu mon cinéma sur ton blog
Soit dit en passant, je ne sais pas comment tu tiens le rythme qui est le tien ici en alignant des billets d'une telle pertinence et avec une écriture aussi libre, jamais redondante, d'une cohérence toute... intime, profonde.
Je fais mon cinéma, donc : les contes ne s'adressent pas qu'aux enfants, je suis bien d'accord. Mais j'aime aussi beaucoup les contes "réservés" aux adultes, et c'est très rare. C'est ce que David Lynch (Twin Peaks, etc... c'est lui) fait exactement au cinéma et exactement avec le cinéma, avec les moyens propres au cinéma. Alors, c'est très violent, et souvent d'un abord complexe, mais si on accepte sa peur et de ne pas tout comprendre strictement rationnellement tout de suite, la beauté offerte atteint des sommets, crois-moi.
Par ailleurs, ce que tu dis sur la recherche intérieure, phase ultime et essentielle de la quête des "héros", me semble faire parfaitement écho avec une des expressions les plus justes que j'ai pu lire sur l'art des comédiens. C'est Isabelle Huppert, que je chéris et vénère, qui "expliquait" que la recherche du comédien ne lui semblait pas du tout "horizontale" - prétendre devenir quelqu'un d'autre, se donner l'air de se transfomer - mais "verticale" : aller chercher au plus profond de soi, comme des racines universelles, et dont les différents développements sont propres à chacun. Je comprends ça comme retrouver des couleurs primaires, par exemple, et après on refait le tableau propre à chacun. Mais au départ, les couleurs sont communes.
Me voilà bien bavard à nouveau, mais, va savoir pourquoi, il faut croire que tout cela me fait aussi penser à ton écriture
Encore, bonne nuit, ma Reine.merci cher D&D pour ce long commentaire si intéressant
Je comprends mieux ce que tu dis au sujet de Twin Peaks...
C'est curieux ce que tu dis: si on accepte sa peur;..la beauté atteint alors des sommets...
à réfléchir cela
très intéressant aussi ce que dit Isabelle Huppert concernant le jeu de l'acteur...
bonne journée à toi, D&DQuand les contes ont été écrits (et ont-ils vraiment été écrits ? je s'agit-il pas plutôt d'une transmission orale d'histoires qu'un jour certains ont couché sur le papier et dont ils pris la paternité) la lecture enfantine n'existait pas ou si peu.
Oui les contes ont été inventés pour les adultes.
J'ai entendu ma fille en parler. Elle en parlait bien. Mais je ne saurais retranscrire ses mots.
Ne dormir toujours que d'un œil et faire semblant de dormir quand la princesse vient me réveiller d’un baiser, c’est la règle de base du bon rêveur.
Les rêves éveillés sont les meilleurs.