Les mots pour le dire
Je pourrais vous parler de l'incroyable douleur à l'épaule qu'aucun antidouleur, aucun anti inflammatoire, même pas un médoc à dérivé morphinique n'a pu valablement soulager, de la détresse dans laquelle je me suis trouvée, de la dépendance pour tous les gestes les plus élémentaires, de la peur de rester à jamais dans ce cauchemar, de l'impossibilité dans laquelle je me suis trouvée pour simplement vivre, assumer le quotidien...ce n'est pas fini, mais cela va mieux, et puis la kiné fait des miracles paraît-il...
Je pourrais vous parler de mes doutes et de mes peurs concernant ma santé, alors que par trois fois ces derniers six mois je me suis trouvée dans une situation difficile, me laissant chaque fois dans un état de faiblesse accrue...que va-t-il se passer à présent? quel est le prochain couac?
Je pourrais vous parler de l'infinie tendresse de ma grande fille infirmière, qui samedi, en l'absence de mon époux (si souvent...bien trop souvent absent) m'a prise en charge, m'a conduite aux urgences, est restée durant les quatre heures d'examens divers et variés...merci ma chérie, je me suis sentie "en sécurité" avec toi...
Je pourrais vous parler de la journée de dimanche durant laquelle mes enfants ont tenu à fêter mon anniversaire, avec une chaleur et un amour dont je m'étonne toujours, moi qui, hélas, ai si peu aimé ma mère (quel euphémisme...) ...accueil chez l'un d'eux, repas comploté en commun, "discours" merveilleux parlant de ce que j'ai été et fait pour eux. Ce qui me fait le plus plaisir, ce n'est pas tant qu'ils aient relevé tout ce que j'ai "fait" pour eux, que ce que j'ai été pour eux et particulièrement écoute écoute écoute. C'est en effet ce que j'ai tenté d'être, je voulais leur donner ce que je n'ai pas reçu, donc c'est possible! Bourrée de médocs et malgré la douleur qui me sifflait dans le corps, j'ai savouré chaque instant de ces heures d'amour partagé.
Je pourrais vous parler de l'absence au repas de ma fille adoptive ce jour-là...venue à l'apéro, repartie par après, elle m'a manqué, je ne veux pas en dire davantage...
Je pourrais vous parler du silence affolant de mon clavier depuis une semaine alors qu'un travail important pour moi m'attend et me réclame...silence du clavier parce que mon bras n'accepte pas de se poser sur lui, mais aussi silence de mes pensées fécondes, incapacité de mettre ensemble deux mots cohérents, sinon douleur douleur douleur...
Je pourrais vous reparler de la solitude existentielle dans laquelle chacun doit finalement et fondamentalement vivre. Les marques d'amitié, les tendresses n'empêchent pas que c'est à nous et à nous seuls de nous débrouiller pour vivre au mieux les "accidents" plus ou moins graves de la vie. J'y pense à l'instant parce que quand un de mes enfants vit un chagrin ou un problème, malgré tout l'amour que j'ai pour eux, c'est à eux et à eux seuls de le gérer, de trouver LEUR solution...