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Coumarine, Petites paroles inutiles
5 février 2007

Souffrir de l'abandon

Pas mal de visiteurs arrivent ici en tapant "adoption" sur les moteurs de recherche. Ils viennent lire l'histoire de l'adoption de ma plus jeune fille, telle que je l'ai racontée assez longuement l'année dernière (voir catégorie "récit d'une adoption"). D'autre part, la responsable d'un forum spécialement consacré à ce sujet, arrivée ici je ne sais comment, m'a demandé la permission de publier tout ce texte en guise de témoignage sur le forum. Elle  prétendait que celui-ci pourrait aider certains couples candidats à l'adoption, certaines mères futures adoptantes.

J'ai accepté...

J'ai aussi reçu pas mal de courriers perso suite à la parution de ces notes sur l'adoption de ma fille...

Je me suis donc dit que de temps en temps j'écrirais un petit quelque chose concernant ce que nous avons vécu en famille, en couple, comme mère...continuer en quelque sorte le "témoignage" et tant mieux si des gens y trouvent une réponse à leurs questions, un encouragement dans les moments difficiles. Parce qu'il y en a bien sûr, il y en a, il faut le savoir...

Je voudrais dire d'abord qu'un enfant que l'on adopte est un enfant qui, d'une manière ou d'une autre a vécu un abandon, et que ce n'est pas chose facile à gérer, ni pour l'enfant qui reste avec une blessure indélébile, même si elle s'est cicatrisée grâce à  l'amour qu'on peut lui donner, ni pour les parents adoptifs qui ont aussi à affronter les crises qui inévitablement vont venir exprimer cet abandon.

Pas mal de gens (dont moi d'ailleurs) qui n'ont pas été abandonnés comme tels par leurs parents biologiques, vivent au fin fond d'eux-mêmes ce ressenti d'abandon à cause des carences parentales et surtout maternelles de leur petite enfance. Ressenti d'abandon qui cause parfois une telle souffrance et qui handicape très fort par après l'avenir relationnel. Souvent ces gens sont des mendiants d'amour qui ont de grandes peurs de perdre l'amour, qui s'avèrent incapables de partager (jalousie), ou qui se blindent au contraire derrière l'indifférence ou l'agressivité. (c'est une caricature bien sûr, mais il y a beaucoup de vrai la dedans)

L'enfant adopté a vécu un abandon effectif: les parents biologiques ont abandonné leur enfant, pour une raison qu'il ne nous appartient pas de juger

Notre fille nous a ainsi été confiée, parce que la mère était dépressive et suicidaire...ce qui ne devait être qu'un simple dépannage de quelques semaines,  s'est transformé en accueil longue durée, orchestré par des visites ponctuelles (et irrégulières) de ses parents bio

Quand nous l'avons accueillie chez nous, elle avait presque cinq mois et accusait un énorme retard. Elle était tellement dans sa bulle, sans sourire, sans communication aucune que j'ai eu peur qu'elle ne soit handicapée mentale (autiste). Le pédiatre nous a rassurés, nous disant que nos quatre enfants auraient tôt fait de l'apprivoiser...ce fut le cas, mais pas aussi facilement que l'on pensait...

Comme c'était un placement en famille, elle retournait ponctuellement chez ses parents biologiques. Elle nous revenait puant la cigarette et la bière, fatiguée, et complètement repliée sur elle-même. Je la plongeais dans un bain, je la savonnais de haut en bas pour gommer cette odeur tenace...durant deux jours elle rétrogradait dans sa bulle, se balançant d'avant en arrière en suçant son doudou, les yeux perdus dans je ne sais quel songe terrible...ces visites dans ces conditions ne lui faisaient que du tort, à nous aussi, et ...on était impuissants pour empêcher ce fiasco

De  plus ces départs étaient déchirants, elle s'accrochait à moi hurlant pour ne pas partir avec celle qu'elle ne connaissait pas, ou si peu...mais elle n'était pas ma fille,  je n'avais aucun droit légal sur elle. De toutes façons je ne voulais pas "disputer" un enfant à sa mère... mais elle était malheureuse...elle a commencé à pleurer toutes les nuits pendant des heures parfois...ce fut très dur, pour elle, pour nous.

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Commentaires
Z
un ouvrage intéressant à lire. "The primal wound" de Nancy Verrier http://www.nancyverrier.com/. Il a été traduit en français par Françoise Hallet, médecin : http://rubriq.x-en-colere.org/articles/livres/primal.php
F
Oui à petits pas ; à ton rythme. Merci.
C
merci Fauvette, je continuerai mais à petits pas...
F
Ton billet m'émeut beaucoup, je suis pas à pas l'histoire de cette petite fille qui arrive chez vous, et doit retrouver sa famille bio de temps en temps... Et je souffre pour elle et vous. Oui s'il te plaît continue à dénouer les fils de cette histoire d'adoption. Je t'en remercie.
C
Pivoine ce que tu dis est exact, mais ouvre un sujet plus large que celui que je désire traiter ici, à savoir l'adoption...<br /> Bonne soirée à toi
Coumarine, Petites paroles inutiles
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