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Coumarine, Petites paroles inutiles
10 août 2006

"Je est un autre" disait-il

Quatre jours à Paris

Quatre jours en compagnie (principalement) de Valclair, qui malgré sa jambe encore un peu douloureuse qui lui imposait d’utiliser une béquille, m’a conduite dans divers coins de son Paris.

J’ai aimé. Beaucoup. Les promenades, les découvertes de toutes sortes (et pas forcément très connues des touristes), les deux expos, les cinémas, les discussions passionnées et passionnantes qui nous ont tenus des heures à table, autour d’une bonne bouteille de vin.

Lisez la note qu’il a  écrite encore hier soir à ce sujet avant de repartir en vacances pour quelques jours. Vous saurez( presque) tout.

Je voudrais  revenir sur l’expo de Cindy Cherman que nous avons visitée au Jeu de Paume.

Cindy Cherman  met en scène un  personnage unique, photographié de mille et une façons : elle-même. Méconnaissable, même si un bout de nez, ou un coin de sourire nous ramène de photo en photo à quelque chose de vaguement familier.

L’art de se déguiser, de se métamorphoser (par le maquillage, les perruques et les costumes) en personnages si différents qu’ils n’ont entre eux rien de commun. La femme fatale côtoie le petite fille sage, la ménagère que les années ont épaissie, l’étudiante libertine, la putain, la femme d’affaires, la demeurée, l’artiste et bien d’autres encore…

On s’est posé la question, Valclair et moi de savoir si toutes ces photos étalées sur trente ans relevaient de la démarche de l’autobiographie (telle que la conçoit l’APA), ou même du « journal intime » en ligne : parler de soi tout en se « protégeant » par un certain anonymat. Bien malin qui peut reconnaître l’artiste sous son déguisement  de clown par exemple

Est-ce une façon de parler d’elle-même ce qu’elle fait là, puisque le seul personnage mis en scène est elle, rien qu’elle (aucun autre personnage n’apparaît sur les photos) ?

Ou est-ce une sorte de jeu, quelque chose qui relève du défi :  "Je est un autre" disait Rimbaud

Cindy Cherman est mille autres, de la poupée objet sexuel, au personnage des contes d’horreur, remplis de sang et de frayeur, du clown triste au personnage falot d’un tableau de la renaissance…

Et les questions me sont venues

Celle que je suis est-elle celle que je crois être, celle que je voudrais être, celle que je montre, celle que les autres croient connaître ou reconnaître, celle qu’on a étiquetée une fois pour toutes ? Celle que je suis est-elle reconnaissable en dessous de ses déguisements bien ajustés selon les milieux qu’elle fréquente ?

Qu’a donc de commun la mère de famille nombreuse avec celle qui tape en solitaire les mots sur son clavier, parfois jusque tard dans la nuit ?

Qu’à donc de commun celle qui écoute tel ou tel de ses enfants dans un moment de crise, et celle qui traverse elle-même un moment de crise qu’aucun de ses enfants ne soupçonne ?

Il y a celle qui parle à X, différente de celle qui échange avec Y. Il y a celle qui rit comme une folle dans une réunion amicale et celle qui insomnie la nuit à force de ruminer des pensées moroses…

Si moi je reste bien souvent une énigme pour moi-même, qui peut prétendre me connaître vraiment telle que je suis ? Si bien souvent je ne m’aime pas, comment espérer que quelqu’un puisse aimer la personne-mystère que je reste ?

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Commentaires
A
"Si moi je reste bien souvent une énigme pour moi-même, qui peut prétendre me connaître vraiment telle que je suis ?"<br /> <br /> <br /> Depuis que j'ai commencé à te lire Coumarine, je remarque que c'est une question que tu (te) poses souvent.
C
Merci Fuligineuse...ton avis m'est précieux
F
Salut, je suis très contente d'avoir lu ta note sur cette expo, et les réflexions qui en découlent. Parce que j'ai vu l'expo aussi et que je ne suis pas arrivée à aller au-delà de l'agacement que m'avait provoqué le narcissisme de Cindy Sherman (qui existe aussi, là n'est pas la question). <br /> <br /> Je pense aussi qu'on est toujours plusieurs personnes, simultanément, et on ne les connaît pas forcément toutes. Il y en a qui sont là en nous potentiellement et qui vont se révéler à la faveur de certaines circonstances, ou bien pas du tout. Et même si on a tendance à se dire "mais c'est pas moi, ça !" Si...
M
Je viens de le découvrir moi-aussi dans un recueil collectif sur les poètes exilés. La forêt des poètes est planétaire...<br /> ________________________<br /> <br /> Luis Mizón est né en 1942 à Valparaíso, au Chili. Il est le fils d'un marin qui passa son enfance à Chillan. Etudes d'histoire et de droit à l'université de Valparaison. Mémoire de maîtrise : "Histoire et Poésie" chez Saint John Perse. Puis enseigne l'histoire du droit à la faculté de Valparaiso.En 1974, à la suite du coup d'état militaire, il arrive en France, travaille entre autre comme journaliste à France-Culture, où il fera plusieurs émissions sur le Chili et la poésie latino-américaine et espagnole.Il suit les séminaires de Picon, Romano, Laplanche, Pomien, Villey à l'Ecole des Hautes Etudes et à la Sorbonne.Il est présenté à Roger Caillois qui, frappé par sa poésie, traduit Terre prochaine en 1977 et L'Arbre en 1978. Traduit par Roger Callois, et à sa mort par Claude Couffon, avec lequel il poursuit une longue et fidèle collaboration.Essentiellement poète, il écrit également des romans et est aussi peintre. <br /> ------------------------------------- <br /> Bibliographie : <br /> <br /> -Poésie Les jambes de l'abîme, Dumerchez,Paris,2005<br /> -Le papillon déguisé, Dumerchez,Paris,2005<br /> -La rumeur des Îles blanches suivi de Grand Erg, La Dragonne, Nancy, 2005 Jacques Lacarrière . <br /> -Le sacré bricolage de l'esprit. ed. Jean Michel Place, Paris, 2004· <br /> -Anthologie de la poésie précolombienne, avec Zéno Bianu, éd. Le Seuil, 2000· <br /> -Le songe du figuier en flamme, poèmes traduits par Claude Couffon, éd. Folle Avoine, 1999· <br /> -L'Eucalyptus, poèmes traduits par Laurence Breysse, éd. Rougerie, 1998· <br /> -Barbes du vent, éd. AEncrages & Co, 1997· Ombres, éd. André Biren, 1994· <br /> -Jardin des ruines, poèmes traduits par Claude Couffon, éd. Obsidiane, 1992· <br /> -Le Manuscrit du Minotaure texte traduit par Claude Couffon, éd. Brandes, 1992· L'Indien témoignage d'une fascination essai. éd. La Différence, 1992· <br /> -La Mort de l'Inca roman, traduit par Claude Couffon, éd. Le Seuil, 1992· <br /> - Chronique du blanc poèmes traduits par Claude Couffon, éd. Unes, 1991· <br /> -Le Jardin du Luxembourg texte traduit par Laurence Breysse, éd. Matarasso, 1991· Chevalier transparent, poèmes, éd. La Palimpseste, 1991· <br /> - Amazones poèmes, éd. L'équipement de la pensée, 1991· <br /> - Voyages et retour, poèmes traduits par Claude Couffon, éd. Obsidiane, 1989· <br /> -Passion de l'Ile de Pâques texte traduit par Nathalie Bréaud, éd. La Manufacture, 1988· <br /> -Noces, texte traduit par Claude Couffon, éd. Brandes, 1988· <br /> - Province perdue · , éd. Cahiers de Royaumont, 1988· <br /> -L'Eclipse poèmes traduits par Claude Couffon, 1988· <br /> -Passages des nuages poèmes traduits par Claude Couffon, éd. Unes, 1986. Prix Jean Malrieu / meilleur livre de poésie traduit en France.· -<br /> -Bassin de pluie éd. André Biren, 1985· <br /> - Le rêve d'Adriana, éd. André Biren, 1985· -<br /> -Terre brûlée, poèmes traduits par Claude Couffon, éd. <br /> -Le Calligraphe, 1984· Poème du Sud, éd. Gallimard, 1982 <br /> <br /> <br /> http://www.printempsdespoetes.com/participez/index.php?http://www.printempsdespoetes.com/participez/moteur.php?fiche_eve&cle=12255<br />
C
ah! dac <br /> merci Gabbel..
Coumarine, Petites paroles inutiles
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